Jean-Paul Rojal, l’artisan du levain
Jean-Paul Rojal n’était pas destiné à devenir boulanger. Né en Équateur, il rejoint l’Europe à l’âge de quatorze ans, entre la Suisse et la France. Il étudie la physique à l’Université de Genève puis bifurque dans le domaine de la finance, après des études de commerce. Il fait carrière dans une banque privée où il finit manager stratégique.

Trajectoire inattendue
Chez lui, faire du pain a toujours été une évidence. Il se souvient du pain que son père ramenait après le travail : « c’est un peu ma Madeleine de Proust, son pain au levain avait du caractère et racontait quelque chose de grand. Je me souviens de mon père qui le mangeait avec de la graisse d’oie ! » Dans son quotidien, Jean-Paul aime recevoir, cuisiner, partager, et toujours le pain est le sujet central. Très vite, il se forme aux côtés de Jérôme Saugy, avec qui il passe de nombreuses heures sur le terrain, en stage, pour découvrir la réalité du travail en circuit court dans un fournil.
A Veyrier, il créé récemment le Pli du Pain, après avoir constaté que les consommateurs manquent de temps pour acheter du bon pain. Dans sa boulangerie artisanale, pas de boutique, ni de tea-room, tout se concentre sur le produit qui bénéficie d’un système de livraison à domicile. En travaillant directement avec des agriculteurs locaux, Jean-Paul adapte ses recettes aux récoltes : épeautre, amidonnier, blé rouge de Bordeaux, … « Chaque farine pose un nouveau défi et donne un pain différent. » Au cœur de son fournil, un levain de dix ans qu’il nourrit chaque jour ; un monde vivant, nourri de bactéries et de levures naturelles, qui façonne le goût et la texture de ses pains.

Un artisan rigoureux, à l’écoute du vivant
Avec une approche vivante, presque philosophique, le nom de son fournil fait référence à Deleuze et sa philosophie des replis de la matière et sa transformation pendant la cuisson. Ancien physicien, Jean-Paul ne laisse rien au hasard. Température, humidité, fermentation : chaque variable est observée, ajustée et respectée. Au total, une période de 24 heures s’écoule entre la formation de la pâte et la sortie du four. Son pain signature c’est un pain de campagne profond et structuré.
Aujourd’hui, les projets ne manquent pas : développer de nouvelles recettes, collaborer avec d’autres artisans, organiser des ateliers… Il rêve de transmettre sa passion et de montrer que la boulangerie artisanale peut séduire les nouvelles générations : « Ce n’est pas un métier facile, mais c’est un métier vivant. Le pain, c’est un prétexte à la rencontre. » Alors que de plus en plus de consommateurs cherchent à donner du sens à ce qu’ils mangent, le travail de Jean-Paul Rojal résonne comme une réponse simple et sincère. Avec son pain au levain, il prouve qu’une autre manière de se nourrir est possible.
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