Anthony Castrilli, de l’Italie au Mexique

Edouard Amoiel
22 janvier 2025
Fils de restaurateurs italiens, Anthony Castrilli a dignement repris le flambeau gastronomique familial et entretient la flamme bien au-delà de la pizzeria Cinecitta.
Cheveux en bataille, long pull en laine torsadée et yeux bleus revolver, Anthony Castrilli arrive à l’heure à notre rendez-vous. C’est la première fois que nous nous rencontrons et c’est la première fois qu’il se prête à l’exercice de l’interviewé. Loin d’être intimidé, il est un peu sur la réserve au début de nos échanges puis s’est rapidement prêté au jeu. Pour l’occasion, il a posé son traditionnel chapeau et nous découvrons au fil de cet échange un personnage attachant qui a su très vite que l’univers de la restauration était fait pour lui. Aux commandes des pizzerias Cinecitta, Osteria Zaza et des restaurants mexicains La Taqueria Los Cuñados à Genève et plus récemment à Crans-Montana, rencontre avec un jeune restaurateur pleins d’avenir.

Souvenirs de carbonara
Ses premiers souvenirs gourmands ont bien évidemment eu lieu autour d’une table au restaurant Cinecitta, véritable institution transalpine en plein cœur des Eaux-Vives. Il est ainsi dès son plus jeune âge en immersion directe dans le restaurant familial, ouvert par son père en 1991. « À l’école, j’étais le seul qui ne mangeait pas à la cantine. Je prenais tous les jours le bus pour rentrer déjeuner au restaurant » se remémore-t-il. Les pâtes à la carbonara sont sans hésitation le plat qui a marqué sa jeunesse et demeure jusqu’à ce jour sa madeleine de Proust italienne. Du côté des études, le jeune Anthony se laisse porter par le système scolaire sans forcément s’y plaire. « Je dois bien avouer que j’étais partisan du moindre effort. Afin d’être sûr d’obtenir la moyenne, je calculais les notes que je devais obtenir pour pouvoir passer. Je n’ai jamais adhéré à l’idée d’être moyen partout et bon nulle part ».
Son père ne souhaitait pas qu’il exerce le métier de restaurateur. Après avoir obtenu son Bachelor en économie, Anthony s’essaye à la banque, un monde qu’il laisse rapidement de côté. Il part à Milan pour faire un master en marketing et communication. Un déclic pour le jeune étudiant. Entre temps, son père commence à changer d’avis et envisage que son fils puisse (enfin) travailler au sein du restaurant. C’est l’époque où les restaurants à concept se multiplient à Genève et la famille Castrilli doit se conformer aux goûts du moment pour ne pas sombrer dans la monotonie et l’oubli. Anthony fait ses armes chez son parrain, propriétaire de la pizzeria Pompéi sur le plateau de Champel, un établissement un brin vieillissant où il peaufine les plans de ce qui allait se transformer en Osteria Zaza.

De l’Italie au Mexique
Le jeune restaurateur revoit complètement les lieux aux côtés de l’incontournable architecte Youri Kravtchenko. Four à pizza apparent, cuisine ouverte, alcôves intimises, bar central propice aux Aperol Spritz et autres coktails… le lieu est une réussite et déboussole le quartier. Au même moment, il décide de sortir des sentiers traditionnels familiaux et reprend, contre toute attente, l’arcade de la rue Montchoisy qui donnera naissance à la Taqueria Los Cuñados. « À la suite d’un voyage au Mexique, j’ai commencé à me poser quelques questions sur l’engouement autour de la cuisine mexicaine. Nous sommes vraiment tombés amoureux de la culture ». Aux côtés de son beau-frère Raphaël Grima, Anthony ne s’arrête décidemment plus.
Sur sa lancée, il profite de la vague entrepreneuriale pour rénover complètement le vaisseau mère familial Cinecitta. Constatant l’engouement autour de l’Osteria Zaza et de la Taqueria, le patriarche accepte d’entreprendre les travaux. « Nous souhaitions moderniser l’ensemble, tout en gardant l’âme des lieux. Mon père étant fan de cinéma, nous avons fait en sorte de respecter l’identité du restaurant tout en avançant dans l’air du temps ». Le Cinecitta 2.0 ouvre en plein Covid et sa nouvelle version est un succès. Le pari de cette cure de jouvence est une réussite, ce qui n’empêche pas Anthony de s’arrêter en si bon chemin. Contre toute attente, Crans-Montana lui fait un appel du pied. Il s’engouffre dans la brèche et ouvre une Taqueria format montagne au cœur de la célèbre station valaisanne.
Mais où va donc s’arrêter Anthony Castrilli ? Mais doit-il forcément s’arrêter ? Genève a besoin de cette jeunesse qui construit et qui entreprend. Non sans fierté, Anthony constate tout le chemin parcouru sans pour autant se reposer sur ses lauriers. On chuchote qu’il pourrait poursuivre son essor du côté du Mexique. Nous ne pouvons que lui souhaiter le meilleur pour la suite…