Affaire de couples

Edouard Amoiel

07 février 2022

Ils sont jeunes, talentueux et ont repris la direction de quelques restaurants historiques et prestigieux de Romandie. De Lausanne à Noirmont en passant par Champéry, rencontre avec des couples heureux à la ville comme à la scène.

Échanger, ne serait-ce qu’une minute, avec Sarah Benahmed est source de bonne-humeur instantanée. Avec son sourire à la fois enchanteur et bienveillant, la patronne du restaurant La Table du Lausanne Palace possède une grâce et une élégance innées. Virevoltant telle une danseuse étoile au milieu de la vingtaine de tables de ce temple gastronomique, elle réveille ainsi une belle endormie. Aux côtés de son conjoint Franck Pelux, qui officie brillamment derrière les fourneaux de l’institution vaudoise, ils insufflent à eux deux une cure de jouvence à l’ancienne maison du chef Edgar Bovier. 

© Anthony Demierre – Sarah Benahmed & Franck Pelux

Tempo gastronomique

Inconcevable de les imaginer l’un sans l’autre ! « Cela fait 12 ans que nous travaillons de concert. Évoluer ensemble professionnellement est une évidence. Nous ne faisons qu’un ». Même si au début de leur carrière Franck avait un profil plus attirant que celui de Sarah, peu à peu leur curriculum vitae se sont vite équilibrés. Les mœurs évoluent et le travail en salle atteint le même niveau d’importance que la qualité de la cuisine. « Le métier de service commence à être enfin respecté. Dans un restaurant, l’un ne va pas sans l’autre et notre efficacité fait partie de cette harmonie. Ce que nous proposons, c’est nous ; notre histoire, notre vie et notre amour » déclare la gagnante du prix Michelin 2019 du Service et de l’Accueil.

Même s’ils dirigent chacun une brigade acquise à leur cause, ces deux professionnels savent garder leur place pendant l’intensité du service de midi ou du soir. Dans ces moments de stress où la communication et la précision sont de mise, le titre hiérarchique de chef est utilisé plutôt que des surnoms affectueux. « En fonction du moment, le passe entre la cuisine et la salle est la ligne à ne pas franchir. C’est Sarah qui dicte le tempo ; elle est le métronome du restaurant. À la cuisine de savoir s’adapter » rappelle Franck.

© Maison Wenger – Anaëlle Roze & Jérémy Desbraux

Infaillible soutien

Direction les hauteurs jurassiennes où le couple Desbraux régale les gourmands de passage dans leur maison gastronomique de Noirmont. C’est en 2019 qu’ils ont fait le grand saut en reprenant la célèbre maison de Georges Wenger. Ancien disciple du regretté Benoit Violier au restaurant de l’Hôtel de Ville de Crissier, Jérémy Desbraux possède un talent incontestable. À ses côtés depuis le début de l’aventure, Anaëlle Roze, son soutien indéfectible, autant sur le plan créatif que moral. « Une chose est sûre ; je n’aurais jamais repris ce restaurant sans elle. C’est une affaire bien trop lourde à gérer pour une seule personne » déclare-t-il d’emblée. Chef ambitieux et récompensé dès la première année de deux étoiles au Guide Michelin et de 18 points au GaultMillau, Jérémy sait que son épouse va lui donner un retour honnête et franc sur son travail. Cuisinière de formation, Anaëlle participe au processus créatif de chaque changement de carte. « Elle me guide dans mes choix, me cadre au quotidien et éventuellement me recadre si besoin. Ses commentaires me font à chaque fois avancer » précise-t-il.

Côté salle, Anaëlle prend plaisir à connaître son audience composée d’habitués et de nouveaux convives amateurs de découvertes. Avec le temps, elle s’est vite rendu compte que les clients se déplaçaient autant pour la cuisine de son mari que pour ses prouesses en salle. « Même s’ils viennent la première fois pour la cuisine de Jérémy, ils reviennent pour une expérience dans son ensemble. Ils sont en confiance. C’est rassurant pour eux de savoir que la maîtresse de maison est aussi la patronne ». Dès le début de l’aventure à Noirmont, le couple s’est efforcé de concilier vie de famille et vie professionnelle. Un équilibre qu’ils ont appris à maîtriser avec le temps.

© Le 42 – Amandine Pivault & Antoine Gonnet

Progression

Gardons de la hauteur tout en changeant de canton et prenons la direction du Valais. Il s’en passe des choses du côté du restaurant Le 42 à Champéry. Contre tout attente, Amandine Pivault et Antoine Gonnet ont annoncé leur départ après quatre ans de bons et loyaux services et pris la direction du Pont de Brent, ancienne demeure de Gérard Rabaey et du couple Décotterd, ces derniers aujourd’hui installés à L’École Hôtelière de Glion. Un changement de maison qui marque l’extraordinaire parcours du duo en place. « Avec cette reprise, nous perpétuons l’esprit de nos prédécesseurs qui travaillaient également en couple. C’est peut-être l’un des critères les plus importants lorsque l’on reprend une maison chargée d’histoire ».

Même si la réalité du quotidien n’est pas toujours facile, Amandine et Antoine continuent de progresser mutuellement pour que l’un puisse briller de mille feux sans faire de l’ombre à l’autre. C’est peut-être là tout le secret ?


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